Tu es née à Puebla, ville mexicaine d’un père anglais et d’une mère mexicaine. On doit bien admettre que tu as pris tout de ta mère et pas grand chose de ton père. La peau halée, les yeux noisette et les longs cheveux d’un noir profond. Rien à voir avec la peau pâle et les cheveux châtains de ton père. Tu as toujours été fière de tes origines mexicaines, de l’héritage de ta maman. Tu es celle du milieu dans la fratrie. Entre un grand frère avec qui tu as toujours été très fusionnelle et une petite sœur, arrivée bien plus tard qui est la prunelle de tes yeux. La vie a été plutôt douce, tu ne vas pas t’en plaindre. Ton enfance était heureuse… Enfin. Jusqu’à tes dix ans.
À dix ans ta mère est tombée malade. Un cancer incurable qui a très rapidement prit sa vie. Ça a été un traumatisme pour vous tous. Ta soeur avait 5 ans à peine et elle ne connaîtrait pas plus votre mère. La peau halée, les yeux noisette et les longs cheveux d’un noir profond. Dans le fond, tu as toujours compris cette décision. Puebla était la ville de ta mère, celle où elle avait grandi, celle où ils s’étaient rencontré, où ils étaient tombés amoureux. Vous avez déménagé aux états-unis, dans la ville de Cleveland. La vie a changé à ce moment-là, pas parce que ça n’allait plus, pas parce que le décès de votre mère avait laissé dans le coeur de ton père un vide immense, mais parce qu’en partant elle avait prit cette douceur familiale, cette douceur maternelle. Ton père s’est réfugié dans son nouveau travail et il n’était plus aussi présent qu’avant. Il ne vous a pas abandonné, mais une distance s'était créé entre vous et lui. Ton frère avait pris la charge familial et prenant soin de vous et toi, toi, tu as décidé de prendre la place de ta mère.
À douze ans, tu as commencé à faire les choses par toi-même : le ménage, la cuisine, prendre soin de ta cadette. Tout ce qu’avait fait ta mère jusque-là. Tu n’as pas le sentiment d’avoir été privé d’enfance, tu étais heureuse de prendre soin de ta soeur, de ton frère et ton père. De prendre la place de ta mère pour remettre de la douceur dans leur coeur.
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“Naya, tu me passes un biscuit ?” Tu baisses les yeux sur Malika qui te souris. Il lui manque deux dents de devant qu’elle a perdu il n’y a pas longtemps et ça te fais rire. Tu as douze ans et tu t’occupes déjà d’elle comme une mère. Malika se trompe parfois et elle t’appelle maman par erreur, elle se sent gênée à chaque fois, mais un sourire suffit à faire disparaître ses sourcils froncés. Tu attrapes un biscuit dans le pot en verre et lui tend en souriant. Elle te rend ta bonne humeur au centuple et file en courant dans sa chambre, le biscuit enfourner dans la bouche.
“Merci de prendre soin de ta soeur Naya. Je sais que je peux compter sur toi.” Tu te retournes et tu souris à ton père qui vient de rentrer du travail. Tu as pris le relais pour lui. ça a rétablis une sorte de lien entre vous qui été brisé depuis plusieurs années.
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L’adolescence a été une période trouble, surtout pour ton père. En fait, tu n’en faisais qu’à ta tête. Peut-être une volonté de rattraper le temps perdu durant ton enfance. À dix-sept ans tu causais bien du souci. Sortie tardive, faire le mur par la fenêtre de ta chambre. Trop de choses qui ont fait devenir fou ton père. Alors à vingt ans, tu es parti, avec quelques économies faite à l’aide de petits boulots pour faire un tour du monde. Jugeant que tu partais trop loin. Heureusement l’adolescence rebelle a vite fait place à une autre volonté. Celle de découvrir, celle de partir. De prendre ta vie, ton destin en main. Alors à vingt ans tu es parti, avec quelques économies faite à l’aide de petits boulots pour faire un tour du monde.
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“Donc tu pars finalement ?” Ton père te sourit bienveillant sur le pallier de la maison. Quand tu lui as fait part de ta décision de partir, il n’a rien dit. Il a accepté ton choix sans rechigner. Il a juste rigolé, sourit et embrassé ton front en te disant que tu étais comme ta mère. Une aventurière. Tu fais un dernier câlin à Malika et à ton frère avant d’attraper ton sac. Tu n’as pas pris grand chose. Juste de quoi voyager léger. Tu ne sais pas trop où tu vas aller, mais tu ne veux plus rester à Cleveland. Alors t’as pris un billet aussi loin que tes économies te permettent d’aller. La France.
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T’as voyagé beaucoup, t’as parcouru l’Europe en essayant d’apprendre quelques langues, mais ton français et ton allemand reste horribles. Puis t’as finit par atterrir à Londres. Tu n’avais pas de sous en poches alors tu es allée vivre chez ta tante quelque temps avant de te trouver un travail. Strip-teaseuse. Tu n’étais pas sûre que c’était le genre de travail que ta famille te voyais faire, mais ça t’allais bien. Entre provocation, séduction et jeu. Puis il fallait bien admettre que tu gagnais bien ta vie avec ce travail. Rapidement, tu as trouvé un appartement dans lequel tu vis maintenant depuis trois ans. C’est là que tu as rencontré Fred, celui qui t’a fait découvrir le vrai Londres. Les bar, les coins sympas loin des touristes. Ah Fred, tu t’y es attaché. Fred et sa tête de premier de la classe qui te fait sourire, qui perds ses mots quand tu le regardes un peu trop intensément. Qui passe par différentes teintes de rouges quand tu te changes sans pudeur devant lui. Parce que tu ne le verras jamais autrement que comme un ami.