Je regardais mon téléphone, furieuse avant de le balancer sur le canapé et monter me changer. Comme toujours ma colère était assez froide. Je n’étais pas du genre à hurler partout et casser des choses. Je calculais mon prochain coup, je réfléchissais à la meilleure manière de faire mal. Je mettais mon chemisier fichu, taché de petites taches de sang à la poubelle. Bien sûr en déplaçant le corps de place pour faire plaisir à mon cher fiancé ça m’avais taché. Heureusement que j’étais assez professionnelles pour ne rien tacher d’autre que mon chemisier de micro gouttelettes. Rien de plus normal. Mais bon. Redescendant, un nouveau t-shirt revêtit, je continuais ma pâtisserie. Avant d’être interrompue en effet j’étais en train de faire une tresse au chocolat et aux noix. J’avais eu envie de lui faire plaisir. L’envie était passée mais j’aimais trop cette pâtisserie pour m’en priver. Je mélangeais mes ingrédients, bougeant aisément dans ma cuisine, même si la manne avec le corps faisait obstruction, je savais parfaitement m’adapter. Au final j’eu le temps de lancer une lessive, planifier mes menus de demains, nettoyer mes ustensiles utilisés pour la tresse avant que je n’entende la voiture de mon compagnon se garer, dans le garage.

Nos tempéraments étaient tous les deux dominants et parfois, comme aujourd’hui cela allait laisser cour à une confrontation. Les points de suspensions étaient clairement un signe pour : tu verras quand je rentre. Hors je l’attendais. Je l’attendais de pied ferme. Merde pour qui il me prenait ?! Je n’étais pas une amatrice. Et sa voiture chérie allait prendre cher si jamais il me la ressortait. La baignoire et puis quoi encore ! J’avais vraiment nettoyé la baignoire pendant trois jours avant d’oser y reposer pied. Pas que son travail me dégoutait, mais merde quand je prends un bain j’aime que l’eau soit claire ou couverte de mousse, pas remplie de globules rouges ou de bactéries ou de virus qu’avait transporté le corps de son contrat précédent ! Ce qui m’énervait était son énervement et sa remarque sur les voisins. Ce n’était pas mon premier corps et je savais quoi faire merde ! Je n’aimais pas qu’il me sous-estime ou qu’il me fasse des commentaires de ce genre. J’avais toujours l’impression de revenir des années en arrière où il était odieux avec moi et se prenait pour le roi du monde, meilleur que moi. Nous nous étions mis d’accord que nous étions doué et que nos compétences favorites respectives étaient incomparables ! Point. Pourquoi venir me refaire des reproches ?!
Je venais de sortir la tresse du four et la poser sur le comptoir alors que la porte menant au garage s’ouvrit. La porte du four laissé ouverte l’odeur de ma pâtisserie embauma l’air délicatement et chaleureusement. Tout le contraire de mon humeur, glaciale. M’emparant d’un couteau, un magnifique couteau scintillant et terriblement bien aiguisé, je m’adossais au final au comptoir, jouant avec avant de porter mon regard sur Tristan qui venait de rentrer dans la cuisine. Le regardant méchant j’attendais qu’il lance les hostilités. Petit con vaniteux !

Je n’avais rien dit alors qu’il était rentré par la porte menant au garage. Je notais de suite son révolver et la manière dont il le sortit. Ça me fit rager encore plus. A la base mon couteau était vraiment pour commencer à préparer le repas du soir. J’avoue je l’avais mis un peu en scène, mais comme si j’allais l’attaquer.  Enfin… les hommes. Au moins il ne me sous-estimait pas et était conscient que je savais manier une arme. Bien monsieur Casarini. Du progrès donc, malgré qu’on soit dans la régression totale. Tristan avait tant évolué entre le moment où il était partit à l’armé et celui où il était revenu… j’avais pris l’habitude de l’appeler par son ancien nom de famille quand il se comportait à nouveau comme le petit con odieux qu’il avait été avant de partir. Jamais à haute voix bien sûr, mais dans ma tête j’associais son humeur actuelle à son ancien comportement.

Qu’est-ce que ça pouvait lui faire qu’un cadavre gise dans le garage. Comme si j’allais laisser le corps à la vue de tous. Bien sûr j’allais égorger un type pendu à notre sèche-linge la prochaine fois, histoire de faire profiter le voisinage. Non mais sérieusement il me prenait pour qui ! Juste pour que sa voiture n’en prenne pas trop cher… Ce n’est pas comme si on avait un garage assez grand. Son argument avait été débile. Enfin du coup je me reconcentrais sur lui alors qu’il me saluait.

« Bonsoir Trésor… »

Réponse sur le même ton. Si jamais il aurait fallu faire une métaphore… Pourquoi pas une ligne sous haute tension et tendue au maximum ? Je me raidis alors qu’il commentait mon couteau, arrêtant de jouant avec par la même occasion. C’était le même couteau de cuisine que j’utilisais depuis des années… offert dans un set par ses soins à Noël. Je le regardais bouger dans la pièce, allant fermer la porte menant au garage. Ayant baigné toute la journée dans l’odeur je ne la sentais pas. Mais en effet je savais que ce genre de chose ne sentait pas bon. Mais bon, aller expliquer à son frère qui avait voulu faire passer un message à un gang rival. Kidnapper un des membres, me l’amener, le couper en petit morceaux et ensuite le congeler. Aujourd’hui quelques mois, presque un an après je devais le décongeler et l’envoyer à différentes adresses. La petite somme que je récupérais avait été pour la robe. Une partie il y a quelques mois de ça, le reste après l’envoi. Ca couvrirait un peu plus de la moitié pour la robe, mais c’était déjà ça de pris.

Je lui lançais juste un regard glacial alors qu’il venait poser sa mallette du comptoir. Bras croisés je donnais un léger coup de hanches pour me redresse avant de m’éloigner de lui alors qu’il allait du côté du frigo, faisant le tour du comptoir pour aller remplir une casserole d’eau jusqu’à la moitié. Y ajoutant un cube de bouillon de légumes je mis le tout sur le feu histoire de faire chauffer. Ensuite je m’emparais des carottes, un poireau et un ognon pour venir les couper sur la planche disposé sur le comptoir. Même un bleu en cuisine saurais que je fais un bouillon. Posant mes légumes je commençais à couper mon poireau, faisant des gestes contrôlés e rapides avec mon couteau. Vinrent ensuite les carottes. Pendant que j’avais bougé j’avais lâché sur le ton de la conversation, de manière légère mais avec un énorme sous-entendu.

« Ton frère serra heureux d’apprendre que j’ai réussis à t’ennuyer. Sinon au pire tu n’as qu’à aller rejoindre une Tamara, je suis sûr que son appartement doit embaumer une odeur exotique, séduisante et luxuriante. Elle a certainement un garage privé sans macchabé certainement. »

Me penchant sur le côté je visualisais la manne comportant les bouts décongelés, chacun placé dans un sachet en plastique. Haussant les épaules avec une fausse expression indifférente je revins à ma tâche de couper mes carottes. Comme si tout ça était normal. Et ça l’était… En dehors de la dispute.

« Ou dans sa cuisine. »

Avait-il seulement remarqué que la manne se trouvait ici ? Je me doutais que non au vue de son point de vue. Enfin mon mouvement de me pencher sur le côté et ma remarque lui mettrons bien la pue à l’oreille. Heureusement j’avais emballés les bouts dans le garage du fait que l’odeur reste la et qu’ici elle n’était pas aussi forte, quasi encore inexistante. Mais bon ça ne durerais pas. Ce soir il fallait les envoyer ces bouts. Du coup j’avais demandé quand même un coup de main et un livreur spécial, ami de la famille, viendra chercher les boites.

Tristan posa sa bière assez brusquement sur le comptoir mais cela ne m’impressionnait pas plus que ça. J’avais grandi dans une famille de mec et plus tard avec des membres de gang. Ne pas montrer qu’on avait peur ou qu’on était impressionné, jamais. Ca laissait l’autre prendre trop de place. Je relevais mon regard vers lui alors qu’il me sortait que j’aurais pu trouver mieux. Envolé le faux air neutre. La colère déformait certainement mes traits. On avait déjà eu des disputes, on avait déjà eu ce genre d’arguments … Et pourtant… pourtant aujourd’hui ça me touchais plus qu’avant. Peut-être parce que la voir si tendre avec lui, et lui la laisser si tendre avec lui… Ces derniers temps on se voyait moins et je crois que ça jouais. Ca et le fait que ça m’avais pris longtemps avant qu’il ne le laisse être tendre avec lui. J’avais l’impression qu’on était rentré dans une sorte de routine ces derniers temps et que je ne lui plaisais plus assez. Autant avant on était complice sur nos contrats, autant là on s’était disputé après les Yardies.

Je me reconcentrait sur mes légumes alors qu’il me disait que ma jalousie était excessive. Malgré moi ma colère fut petit à petit remplacée par autre chose. Une peur. Une peur viscérale. La peur de le perdre. Je ne savais pourquoi ça m’affectait autant ces derniers temps. Peut-être vraiment cette histoire de routine… En Amérique il y avait toujours la famille ou quoi pour nous distraire ici on était plus isolé, moins d’amis, moins de gens de confiance. Mes carottes coupées je les balançais dans la casserole ainsi que les bouts de poireaux, avant d’aller couper mon ognon.

« Je n’ai jamais prétendu tout faire mais quand je m’occupe d’un contrat, je fais en sorte de ranger derrière moi. »

J’avais profité qu’il s’empare de sa mallette pour parler, ne haussant toujours pas le ton. Il ne réagit pas de suite. Vu que j’avais parlé entre mes dents je me demandais s’il avait entendu mais au final il se retourna et commença un speech. Je l’écoutais, la colère primant toujours sur cette peur qui se faisait sentir en moi. Mon couteau fendait l’air rapidement, mes gestes étaient secs et le bruit de la lame sur la planche l’était tout autant. Des petits coups secs et rapides. Il était injuste de dire que je monopolisais le garage, j’avais une pièce cachée spéciale, qui ne prenait en rien de la place dans le garage ! Je lui lançais un regard venimeux alors qu’il parlait d’Adrien et Thomas. Non mais sérieusement, il me connaissait si peu qu’aucun des deux ne me plaisait au niveau caractère ? N’empêche je me doutais que c’était une réponse quand à ma remarque avec Tamara. Balançant mon ognon, coupé beaucoup trop petite mais c’était un bon exécutoire d’utiliser un couteau, dans l’eau bouillant doucement ou déjà les carottes et le poireau faisaient trempettes. C’est la remarque sur le deal qui me fit le plus mal. Alors c’était ça…. Notre mariage n’était qu’un deal à ses yeux ? Un simple contrat ? Ça pour le coup ça me fit arrêter un instant avant de reprendre mes gestes. Alors que je mettais un couvercle sur ma soupe et que je m’emparais d’une serpillère propre dans une des armoires je lui répondis :

« Inaccessible ? Le garage ? Pour ton égo certainement ! Pourquoi crois-tu que je me suis cassé le cul à aménager l’ancienne cave à charbon ?! Justement c’était pour ne pas te priver, alors pour une fois que j’y laisse un corps t’es prié de pas faire ta diva ! Tu m’as engeulé directement par messages, y avait d’autres moyen de faire passer le fait que tu es frustré d’avoir tué une fille aussi bien que Tamara ! »

A la fin je m’étais retrouvé à lui faire face, le regardant droit dans les yeux. Bleu contre bleu. Finalement je secouais juste la tête, m’avançant vers la porte menant au garage et lâchais en l’ouvrant :

« Pourquoi il y aurait un soucis avec notre mariage ? Je croyais qu’on n’avait jamais de soucis pour exécuter nos contrats ! »

Claquant la porte je fermais à clef de mon côté, descendant les marches deux à deux essayant d’ignorer les larmes qui coulaient sur mes joues. Je n’avais pas su retenir celle qui était apparue alors que j’évoquais notre capacité à exécuté des contrats. C’était un truc dont on était fière avant. On savait toujours retomber sur nos pattes, même si ça ne marchait pas comme prévu au final on obtenait toujours ce qu’on voulait. Le patriarche avait su nous reconnaitre ce talent. Mais du coup la force des choses faisait que la première larme ayant coulée, les autres avaient suivies. Allumant la lumière je me dirigeais vers le coin nettoyage. M’emparant d’un s’eau je fis couler de l’eau chaude dedans via l’évier que nous avions installé ici. Ayant une dose beaucoup trop grande du produit nettoyant le plus fort que j’avais, je m’appliquais alors à nettoyer après avoir dégagé le sol. Rien ne me fera remonter ces marches pour aller cherches les clefs de Tristan pour bouger sa voiture. Je ferais avec. Le sang n’avais pas coulé sur le sol donc pas besoin d’effacer des marques. Je m’appliquais alors à nettoyer.

Pourquoi étais je descendue ici ? Pourquoi m’étais je mise à nettoyer ? Parce que cette peur était celle de perdre mon amour. J’aimais Tristan… Mais ces derniers temps… oui j’avais eu des compliments avant cette soirée aux enchères et on s’était embrassé… Mais on avait fini le contrat sur des critiques et même avant… les gestes tendres qu’on avait étaient calculé, habituels… Je ne lui avais plus fait de surprises depuis longtemps et vice versa. Une routine… Et je ne voulais pas perdre cet homme que j’avais appris à aimer, cet homme qui m’avait apporté tellement. Où était passé le Lucas que j’avais appris à connaitre après son retour de guerre avec toutes ces blessures ? Ou était l’Elio qui s’était dévoilé à moi ? Ou était cet homme qui s’était caché derrière une carapace pour plaire à son père, mais que j’avais su percer à jour et qui m’avait fait place dans son cœur ? Peut-être n’avait-il plus besoin de moi ? Peut-être ne m’avait-il jamais aimé que pour le réconfort que je lui amenais ? Je fis une pause dans mes mouvements essayant de reprendre le contrôle de mon corps et essayant de reprendre ma respiration aussi entre deux sanglots. Essayant mes yeux je repris mon ménage frottant jusqu’à ce qu’une odeur de citron embaume l’air.

Jamais je n’avais eu des doutes sur ses sentiments… jamais je n’avais pleuré pour une de ses remarques… Je n’avais plus pleuré depuis la mort de ma famille. Sauf quand je coupais des ognons, mais même au fil des années et avec toute les manipulations de produits c’était passé. Je crois bien que la seule fois où j’avais pleuré c’était lors d’un moment à deux assez intime, et pas sur un plan physique. On s’était confié l’un à l’autre et j’avais ouvert mon cœur, tout comme lui avait ouvert le sien. Je crois vraiment que c’était mes doutes qui avaient fait que je prenne sa remarque si à cœur. SI je n’étais pas assez bien pour lui ? Et puis cette histoire comme quoi il ne voulait pas de ce mariage…

Contemplant mon œuvre terminée je rangeais mon matériel, mes gestes de plus en plus tremblant alors que mon contrôle s’envolait petit à petit. Je finis par ouvrir une fenêtre avant de contempler le garage d’un regard vide. Je laissais les larmes couler. Notre mariage n’était qu’un contrat. Je me dirigeais finalement vers ma cave, me disant que j’y trouverais peut-être une occupation ou un réconfort. Peut-être qu’il ne m’aimait plus. Mon regard tomba sur une boule à neige qu’il m’avait offert et qui m’aidait à me concentrer d’habitude, d’où sa place dans un endroit aussi insolite. Les larmes coulèrent de plus belles et je finis par me laisser glisser contre le mur. Oublié ma soupe, oublié mon magasin de pâtisserie, oublié mes devoirs envers la famille. La solitude, les doutes et la tristesse prenant le dessus. Ramenant mes genoux contre moi je me laissais aller à mes sanglots, le silence dans la pièce augmentant seulement cette sensation d’isolement.

J’entais encore sa voix comme une hantise : ‘bon sang arrêtes avec ça… Tu as un sérieux problème !’. Ces mots me faisaient peur. Qu’est-ce qu’elle avait eu que je n’avais pas ? Ou alors justement qu’est-ce qu’elle n’avait pas et que j’avais ? Des problèmes… Peut-être qu’en venant ici il avait apprécia la vie simple et ne voulait plus de notre ancienne dynamique ? Peut-être voulait-il s’éloigner de tout ce monde. Peut-être qu’il ne me trouvait plus attirante… Peut-être avait-il besoin d’une femme plus doué, plus à l’écoute ? Je l’écoutais et je posais des questions sur son roman ses cours et autre… Mais était-ce suffisant ? Il ne m’avait jamais fait lire son roman… Je n’étais certainement pas la bonne personne… Des tonnes d’autres scénarios tournaient dans ma tête, des tonnes de futur les uns plus noir que les autres ayant comme point commun Tristan partant, s’éloignant de moi. Ca avait tellement tourné en boucle que ça en devenait presque une évidence. La machine avait été lancée e impossible de l’arrêter depuis. Les larmes coulaient sans que je ne puisse les arrêter. Mon monde s’effondrait. Je n’étais qu’un contrat.

Tous ces souvenirs, tous ces rires, tous ces moments complices… Nos rêves, les siens, les miens… tout réduit à ces simples mots : ‘c’était le deal’. Encore une fois sa voix résonnait comme un fantôme à mes oreilles. Ses mots s’enfonçant plus profondément dans mon esprit. Je pris mes mains au-dessus de ma tête, tirant légèrement sur mes cheveux, prise par mes sanglots. Je relevais subitement la tête quand j’entendis une voix, sa voix. Tellement différente que celle qui tournait dans ma tête. Tellement douce. Je le regardais, encore persuadée qu’il allait me quitter … Pourquoi faire durer la torture à me parler sur ce ton. Je le regardais. Je le détestais tellement à ce moment-là… Lui et son sourire qui avait eu raison de moi, son humour qui m’avait fait rire, son regard qui m’avait rassuré, son touché qui m’avait fait me sentir vivant, ses bras qui avaient été l’endroit le plus sûr au monde. ‘Maison’. Je le haïssais tant de m’avoir fait l’aimer tant alors que pour lui… ‘C’était le deal’…

J’étais resté silencieuse le regardant doucement, n’essayant même plus de contrôler les sanglots qui me prenaient. Je le regardais se racoler et ne pus résister à l’envie de serrer mes genoux plus contre moi. Une veine tentative de protéger mon cœur de lui. Veine… il avait déjà pris tellement de place. Je le regardais dans les yeux bleus alors qu’il parlait d’une voix inquiète. Fini la froideur, fini les reproches… Jusqu’à la prochaine fois ou je ne serais pas assez bien. Je pris alors la parole, ma voix alternée par les sanglots, les pleurs. Plus rauque, moins assurée et entre coupée.

« Je ne suis pas Tamara… Je ne serais jamais comme elle… Alors s’il te plait… Quittes moi juste… au lieu de me faire rêver et croire… en quelque chose comme notre mariage… Abrège la torture… je t’en prie… »

Je ne me rendais pas réellement conte, et ne voulais certainement pas qu’il applique mes mots. Je voulais me réfugier dans ses bras, je voulais qu’o retrouve notre complicité… Me réveiller à ses côtés et pouvoir attendre qu’il se réveille me manquait… Faire grasse matinée ensemble, se coucher ensemble ou sortir au cinéma… Mais ces derniers temps il devait corriger ses copies ou écrire son roman. Il n’était plus vraiment avec moi. Je me souvenais des fois ou on se pourchassait dans la maison pour une bêtise en riants aux éclats pour finir essoufflé dans les bras de l’autre qui nous avait attrapé… Je voulais être la femme parfaite pour lui… mais je n’étais pas Tamara… j’étais Liz… J’étais Catherine. La tête de mule, fort caractère, dominante, contrôleuse, jalouse, possessive, excessive, taquineuse… Amoureuse de lui. Je ne pouvais pas offrir autre chose…

Je me sentais si mal. Je ne m’étais pas rendue compte que mon mal être était si avancé, ni même si ancré. Une jalousie, une simple graine, un simple détail qui était resté, qui avait grandi, pris de l’importance. J’essayais d’expliquer ce mal-être à Tristan, persuadée qu’il allait me quitter, que je n’étais pas bien. Ce n’était même plus des doutes mais une évidence à mes yeux. J’avais laissé le corps dans le garage, pour moi ça n’avait été qu’un détail, rien d’important, mais lui ça l’avais énervé. D’habitude je savais prévoir ce qui l’énervait ou pas. D’habitude je savais anticiper. Et d’habitude j’étais certaine d’avoir juste et j’avais juste. Ici j’avais été surprise par sa colère soudaine, je n’avais pas compris. Et ça m’avait fait peur : perdre cette complicité, perdre ce lien… Ne plus être sur la même longueur d’ondes, devenirs des étrangers…

Son non direct me fit légèrement sursauter. Non quoi ? Il voulait faire durer la torture ? Il osa alors sa main sur moi, perdue dans mon univers où il me quittait je ne comprenais pas ce geste. Il reprit alors la parole et je compris que quelque chose clochais. Tristan ne cherchais jamais ses mots. Ou alors très rarement. Le fait qu’il ait du mal avec sa phrase me fit comprendre qu’il était sincère. Peut-être qu’il ne s’était pas encore rendu compte qu’il ne voulait plus de moi ? C’est quand il s’excusa que le foute fis finalement son chemin. Un doute inverse à celui qui m’avait pris, il y a des jours de cela, après notre dernier contrat. La pression sur ma main fit relever mon regard vers lui et je plongeais finalement mon regard dans le sien. Un bleu plus doux, plus tendre et plus chaleureux. Un regard plus agréable. Perdue, essayant de clarifier mes pensées, je n’eus pas le temps de répondre avant qu’il ne reprenne.

L’entendre s’excuser, se rebattre sur lui-même, prendre toute la faute sur lui me fit comme un électrochoc. Je n’avais pas voulu le briser. Il avait son caractère, j’avais le mien, nos débats et nos ‘disputes’ étaient souvent explosives mais brèves et se finissant de manière plutôt charnelle. Mais là le fait de voir qu’il mettait de côté son tempérament juste pour moi… Le doute devenait plus grand, la remise en question faisait son chemin dans mon esprit. Il mettait ses barières de côtés, à moi d’en faire de même quelque part… Essuyant mes joues du revers de ma main, celle qui n’était pas dans la main de Tristan, je reniflais une fois avant de répondre :

« Je … je suis désolé de réagir de la sorte c’est juste que… »

Je le regardais alors dans les yeux, ces yeux qui me regardaient avec inquiétude.

« Tu l’a laissé être si tendre avec toi, et tu l’as regardé si… Enfin… Quand tu es revenu de cette salle de bain tu étais si froid, distant aussi… Je … Je me suis mise à me comparer à elle et … Je n’étais pas elle. Et ça m’a fait peur. J’ai cru que je n’étais pas assez… pour toi… »

Je le regardais, appréhendant sa réaction à mes mots. Et pourtant maintenant que j’étais lancée, j’avais envie de tout déballer. Même s'il était impossible de tout raconter en une fois.

« Quand tu as dit que notre mariage se basait sur un deal… Tu n’as jamais vraiment été investi… je croyais que c’était juste parce que ce n’était pas ta tasse de thé, mais que tu étais aussi impatient que moi… Que tu valorisais autant ce mariage que moi… mais si ce n’est qu’un deal… »

Je le regardais perdue, essayant de comprendre, essayant de me ressaisir mais surtout essayant de saisir cette chance qui semblait flotter entre nous, l’opportunité qui nous rapprocherait.

« Je veux pas qu’on se perde … »

Je faisais référence à nos tempéraments de feux, je faisais références à nos caractères qui nous définissait, qui plaisaient chez l’autre. Ce que j’aimais chez Tristan était son côté possessif, maîtrise de soi, nécessaire pour notre travail. Mais aussi son côté passionné, quand il parlait de littérature par exemple. Je ne voulais pas le perdre…

J’avais commencé à vider mon sac… Le fait qu’il mette sa fierté de côté, qu’on ne joue pas à mon cheval est plus grand que ton cheval, qu’on s’excuse tous les deux… Ca faisait du bien. Il ne me faisait pas passer pour une merde, n’essayait pas d’avoir le dessus, et vice versa. On était juste deux humains s’aimant et se mettant à nu. J’avais craqué la première dans la cuisine, mais il n’en avait pas profité, ni n’avait essayé d’en tirer partit. Au final il se comportait comme si ce n’était pas grave que j’ai craqué et je voyais qu’il voulait m’aider. C’était rassurant, c’était agréable. Je me sentais, petit à petit, à nouveau proche de lui. Nos regards se croisaient, s’accrochaient longtemps. Et même s’ils étaient entrecoupé parce qu’on le baissait ou que les larmes coulaient, ils se retrouvaient toujours. Bleu contre bleu. Âme contre âme. Cœur contre cœur.

Je penchais mon visage légèrement contre sa main, savourant le contacte, tout en écoutant ses mots. Un rôle, un simple rôle. Et pourtant il avoua qu’il avait eu des remords à la tuer. Je le regardais inquiète alors qu’il me disait être parfois torturé. Je ne voulais pas qu’il aille mal. Ses mots me firent du bien, un bien fou. Il m’aimait. Je me sentais mieux. Dans ce genre de situations, le fait de l’entendre de la bouche de l’autre était juste ce qu’il fallait. Je me laissais bercer par sa caresse alors qu’il reprenait. Il avouait ne pas être doué pour ce qui était mariage, et affirmait que je n’étais pas un contrat. Je respirais mieux, alors qu’il mettait autant de conviction dans ses mots. Sa dernière question pourtant me fit baisser le regard, me faisant sentir mal légèrement. Coupable aussi. Je pris un instant pour trouver mes mots…

« C’est juste que… Tu la laisse t’approcher si facilement et tu avais l’air d’apprécier… Et ce n’est pas elle le souci mais… j’avais l’impression qu’on s’était éloignés et ça m’a blessé que tu la laissais t’approcher elle, alors que moi qui te connais et qui t’aimes ne pouvais pas, tu ne me laissais plus… Je ne sais pas… Ca a fait mal. C’est une accumulation je crois… »

Je le regardais à nouveau dans les yeux :

« On agit plus comme avant, j’ai l’impression qu’on a perdu la complicité qu’on avait. J’ai eu peur que … cette vie qu’on a ici à Londres te fasse te rendre compte que tu voulais autre chose… Quelqu’un d’autre. Et je … Tes mots tantôt ça a juste tout rendu plus réel. Je veux dire….. C’est quand la dernière fois qu’on a pas rigolés comme des malades en se poursuivant dans la maison, sans chercher à dominer l’autre ou être meilleur, juste nous deux rigolant ou alors se poser et discuter de plans, de trucs qu’on veut faire ? Ca fait si longtemps… j’ai juste eu l’impression de te perdre…. »

Je le regardais avant de caresser sa main de la mienne.

« Quant au mariage... Tu ne dois pas être doué c’est juste que… On n’a même pas une date et je n’ai aucune amie ici qui pourrait être ma demoiselle d’honneur, et je n’ai personne pour m’amener à l’hôtel et j’ai l’impression que ce n’est pas important pour toi alors que pour moi c’est … Enfin on compte se marier. C’est … Je veux dire, je vais devenir ta femme Tristan, j’y accorde de l’importance à cette cérémonie et à ce qu’elle représente et j’ai juste… L’impression que tu t’en fiches… Je ne te demande pas de te forcer à faire quelque chose que tu n’aimes pas. Je ne veux rien t’imposer, mais … on ne parle jamais… »

Mon débit de parole avait accéléré pour cette confidence. Ca me stressait énormément et c’est vrai qu’on ne parlait pas énormément de ce mariage, ce qui me donnait l’impression que ce n’était qu’un nuage, un rêve… Je rajoutais plus doucement :

« Je ne veux pas que tu te prive du garage, c’est notre maison, et je ne veux pas non plus que tu te forces à parler nappes ou fleurs si tu n’aimes pas. Je veux juste qu’on se retrouve. »

Regard suppliant, cœur à nu. Rien que pour lui.

Je le laissais embrasser le dos de ma main avant qu’il ne réponde. Toute cette histoire avec Billie et Tamara… vivement que je puisse l’oublier ! Je fis un léger sourire crispé alors qu’il me disait que ce n’était pas voulu que je me sente mise de côté. Je me doutais bien, du moins maintenant. La discussion passa ensuite sur notre éloignement. Le fait qu’il me dit qu’il n’avait pas vu que c’était à ce point me fit du bien. Pas que la situation faisait du bien, mais le fait qu’il me confirme que je n’étais pas folle, qu’il ne me refoule pas en mode ‘tu imagines tout !’. Je hochais la tête à son explication, comprenant son point de vue, comprenant ce qui s’était passé. Un léger sourire se fit sur mes lèvres :

« C’est tout ce que je veux aussi ! »

La discussion passa sur le mariage et je m’emportais légèrement, hyperventillant légèrement. Mais une fois fini j’étais contente d’avoir vidé mon sac. Mais la culpabilité vint alors que Tristan renchérit avec de l’humour.

« Tristan, non tu… »

Ma phrase fut coupée par ses mots. Ma voix était rauque et basse, brisée. Je me taisais alors, l’écoutant parler. Je compris alors que j’en faisais trop avec cette cérémonie. C’est vrai qu’au final on aurait pu se marier vite fait bien fait. Mais j’aurais eu l’impression d’avoir pris une décision à la vas vite. La cérémonie était pour moi une manière de consolider ce lien, y accorder une importance et une attention particulière. Je restais interdite pour l’instant sur le sujet, laissant la vérité que je me voilais, faire son chemin dans mon esprit. J’évoquais le garage, je m’excusais à mon tour. Sa réponse me rassura, mais me fit me révolter aussi. Il était doué pour pleins de choses !!!! Je voulais riposter qu’il était doué pour m’aimer, la preuve il avait réussis à me faire m’ouvrir à lui, mais son mouvement me fit rester silencieuse, attendant la suite.  Front contre front je me perdais dans son regard bleu avant de soupirer doucement :

« Tristan… Je t’aime ! »

Ma voix n’était qu’un murmure et pourtant mon affirmation était solide et irrévocable. J’aimais tant cet homme. Me laissant alors allers contre lui, nous nous positionnâmes différemment. Il se retrouvait dos au mur et moi contre lui, passant mes bras autour de son torse, posant ma tête sur son épaule. Blottie contre lui je repris doucement :

« Tu es doué pour m’aimer, n’en doute pas. Tu m’aimes comme personne ne le fait, et je t’aime en retour. J’aurais peut-être du t’en parler avant mais je ne savais pas comment. »

Commençant à jouer distraitement avec un bouton de sa chemise, sans avoir la moindre idée derrière la tête, je continuais doucement.

« Pour le mariage… J’ai l’impression que si on se marie vite fait bien fait cela n’aurait aucune valeur, aucune importance. J’ai toujours considéré que les choses les plus importantes et ayant le plus de valeurs sont celles dont on s’occupe le plus. Je ne voulais pas d’un mariage rapide parce que … Ça aurait signifié qu’il n’aurait eu aucune importance. Hors je veux qu’il ait une importance. Ce lien est la chose la plus importante à mes yeux, devenir ta femme c’est… c’est un honneur, c’est une chance, un rêve. Et je veux vivre ce rêve avec toi ! »

Dans cette cave isolée, blottie contre lui je me sentais étonnamment bien. La tempête était passée, on s’était retrouvés. Et c’était bien mieux comme ça. Les confidences coulaient à flots, les cœurs s’ouvraient comme jamais. Et c’était bien ainsi.

Chanson - Kelly Clarkson "Meaning of life"

Première : You show me the meaning of life (Tu me montres le sens de la vie)
Deuxième : Cause when you kiss me, I know who I am (Parce que lorsque tu m'embrasses, je sais qui je suis)
Troisième : I was broke down so alone in the dark Until you showed me the light (J’étais brisé, si seul dans l’obscurité jusqu’à ce que tu me montres la lumière)

Je m’étais laissé aller contre lui, m’ouvrant à lui comme je l’avais fait des années auparavant quand on avait commencé à se rapprocher. Je me détendais au fur et à mesure qu’il jouait avec mes cheveux, trouvant ce geste agréable. Je souris tristement alors qu’il me disait qu’il ne fallait pas me torturer de la sorte. C’était plus simple à dire. Mais je crois qu’en effet je prenais sur moi, beaucoup en fait et que ça avait explosé aujourd’hui. J’exposais mon point de vue vis-à-vis de la cérémonie, essayant de lui faire comprendre. Je n’étais pas dans une optique d’imposer mon avis, juste mon ressentit, je voulais qu’il comprenne.

J’appréciais le ton sur lequel il me répondait. Sa voix était agréable, douce et chaleureuse. Elle me berçait et me rassurait énormément. Je devais avouer que peut-être j’en avais trop fait, que je m’étais focalisé dans une illusion d’une cérémonie parfaite. Je fermais les yeux doucement alors qu’il embrassait mon front, me blottissant plus contre lui.

« Peut-être que j’en attends trop aussi… pas de toi spécialement. Mais c’est vrai que je me focalise sur ce mariage et cette cérémonie en grand. Plus petit pourrait marcher aussi. »

Du coup une idée émergea doucement dans mon esprit. Un mariage surprise pourquoi pas ? Un truc simple mais beau ? Après tout je pouvais marier mes idées de cérémonies et l’appliquer à une petite fête entre nous deux. Pourquoi pas dans le jardin ? J’imaginais la scène, Tristan rentrant le vendredi de ses cours découvrant la maison décorée ainsi que le jardin avec des indications cachée pour une cérémonie surprise… ou alors on choisissait une journée et on faisait ça entre nous ? Mon esprit était emballé par l’idée et commençais à partir dans toutes les directions, quand Tristan coupa tout ça par une question. relevant alors doucement la tête je plongeais mon regard dans ses yeux bleu un instant je finis par répondre avec un léger sourire :

« Dans un mois ? »

Un ultimatum. Je ne voulais lus revivre une crise pareille, je ne voulais plus l’ennuyer ou qu’il se sente inutile. Du coup un mois me semblait bien… S’il voulait bien lui…